02 enero 2011

Los amorosos / Les amoureux / The Lovers


LOS AMOROSOS

Los amorosos callan.
El amor es el silencio más fino,
el más tembloroso, el más insoportable.
Los amorosos buscan,
los amorosos son los que abandonan,
son los que cambian, los que olvidan.
Su corazón les dice que nunca han de encontrar,
no encuentran, buscan.

Los amorosos andan como locos
porque están solos, solos, solos,
entregándose, dándose a cada rato,
llorando porque no salvan al amor.
Les preocupa el amor. Los amorosos
viven al día, no pueden hacer más, no saben.
Siempre se están yendo,
siempre, hacia alguna parte.
Esperan,
no esperan nada, pero esperan.
Saben que nunca han de encontrar.
El amor es la prórroga perpetua,
siempre el paso siguiente, el otro, el otro.
Los amorosos son los insaciables,
los que siempre ¡qué bueno! han de estar solos.

Los amorosos son la hidra del cuento.
Tienen serpientes en lugar de brazos.
Las venas del cuello se les hinchan
también como serpientes para asfixiarlos.
Los amorosos no pueden dormir
porque si se duermen se los comen los gusanos.

En la obscuridad abren los ojos
y les cae en ellos el espanto.

Encuentran alacranes bajo la sábana
y su cama flota como sobre un lago.

Los amorosos son locos, sólo locos,
sin Dios y sin diablo.

Los amorosos salen de sus cuevas
temblorosos, hambrientos,
a cazar fantasmas.
Se ríen de las gentes que lo saben todo,
de las que aman a perpetuidad, verídicamente,
de las que creen en el amor como en una lámpara de inagotable aceite.

Los amorosos juegan a coger el agua,
a tatuar el humo, a no irse.
Juegan el largo, el triste juego del amor.
Nadie ha de resignarse.
Dicen que nadie ha de resignarse.
Los amorosos se avergüenzan de toda conformación.

Vacíos, pero vacíos de una a otra costilla,
la muerte les fermenta detrás de los ojos,
y ellos caminan, lloran hasta la madrugada
en que trenes y gallos se despiden dolorosamente.

Les llega a veces un olor a tierra recién nacida,
a mujeres que duermen con la mano en el sexo, complacidas,
a arroyos de agua tierna y a cocinas.

Los amorosos se ponen a cantar entre labios
una canción no aprendida.
Y se van llorando, llorando
la hermosa vida.


- Jaime Sabines










The Lovers


The lovers say nothing.
Love is the finest of the silences,
the one that trembles most and is hardest to bear.
The lovers are looking for something.
The lovers are the ones who abandon,
the ones who change, who forget.
Their hearts tell them that they will never find.
They don't find, they're looking.

The lovers wander around like crazy people
because they're alone, alone,
surrendering, giving themselves to each moment,
crying because they don't save love.
They worry about love. The lovers
live for the day, it's the best they can do, it's all they know.
They're going away all the time,
all the time, going somewhere else.
They hope,
not for anything in particular, they just hope.
They know that whatever it is they will not find it.
Love is the perpetual deferment,
always the next step, the other, the other.
The lovers are the insatiable ones,
the ones who must always, fortunately, be alone.

The lovers are the serpent in the story.
They have snakes instead of arms.
The veins in their necks swell
like snakes too, suffocating them.
The lovers can't sleep
because if they do the worms ear them.

They open their eyes in the dark
and terror falls into them.

They find scorpions under the sheet
and their bed floats as though on a lake.

The lovers are crazy, only crazy
with no God and no devil.

The lovers come out of their caves
trembling, starving,
chasing phantoms.
They laugh at those who know all about it,
who love forever, truly,
at those who believe in love as an inexhaustible lamp.

The lovers play at picking up water,
tattooing smoke, at staying where they are.
They play the long sad game of love.
None of them will give up.
The lovers are ashamed to reach any agreement.

Empty, but empty from one rib to another,
death ferments them behind the eyes,
and on they go, they weep toward morning
in the trains, and the roosters wake into sorrow.

Sometimes a scent of newborn earth reaches them,
of women sleeping with a hand on their sex, contented,
of gentle streams, and kitchens.

The lovers start singing between their lips
a song that is not learned.
And they go on crying, crying
for beautiful life.


- Jaime Sabines

Translated by W.S. Merwin









Les amoureux

Les amoureux se taisent.
L’amour est le silence le plus délicat,
le plus tremblant, le plus insupportable.
Les amoureux cherchent,
les amoureux sont ceux qui abandonnent,
qui changent, ils sont ceux qui oublient.
Leur cœur leur dit qu’ils ne trouveront jamais,
ils ne trouvent pas, ils cherchent.

Les amoureux vont comme des fous
parce qu’ils sont seuls, seuls, seuls,
à s’abandonner, à se donner à tout moment,
pleurant parce qu’ils ne sauvent pas l’amour.
L’amour les préoccupe. Les amoureux
vivent au jour le jour, ils ne peuvent, ils ne savent pas faire autrement.
Toujours ils s’en vont,
toujours, vers quelque part.
Ils attendent,
ils n’attendent rien mais ils attendent.
Ils savent qu’ils ne trouveront jamais.
L’amour est le prolongement perpétuel,
toujours le prochain pas, l’autre, et puis l’autre.
Les amoureux sont les insatiables,
ceux qui toujours – c’est drôle ! – seront seuls.

Les amoureux sont l’Hydre de l’histoire.
Ils ont des serpents à la place des bras.
Les veines de leur cou enflent
comme des serpents aussi pour les asphyxier.
Les amoureux ne peuvent pas dormir
parce que s’ils s’endorment les vers les dévoreront.


Dans l’obscurité ils ouvrent les yeux
et la terreur leur tombe dessus.

Ils trouvent des scorpions sous les draps
et leur lit flotte comme sur un lac.


Les amoureux sont fous, ils ne sont que fous,
sans dieu et sans diable.

Les amoureux sortent de leur caverne
tremblants, affamés,
pour chasser les fantômes.
Ils se rient de ceux qui savent tout,
de ceux qui aiment à perpétuité, pour de vrai,
de ceux qui croient que l’amour est une lampe à l’huile inépuisable.

Les amoureux jouent à attraper l’eau,
à tatouer la brume, à ne pas s’en aller.
Ils jouent au long, au triste jeu de l’amour.
Personne ne doit se résigner.
Ils disent que personne ne doit se résigner.
Les amoureux rougissent de toute conformation.


Vides, mais vides de part en part,
la mort fermente derrière leurs yeux,
et ils marchent, ils pleurent jusqu’à l’aube
des trains et des coqs prenant leur douloureux congé.

Ils sentent parfois le parfum d’une terre qui vient de naître,
l’odeur de femmes qui dorment une main sur le sexe, satisfaites,
le parfum de sources tendres et de cuisine.

Les amoureux se mettent à fredonner une chanson
qu’ils n’ont pas apprise.
Et ils s’en vont pleurant, pleurant
la vie merveilleuse.
Traduction : Annabelle Cerezo

0 comentarios:

Publicar un comentario

Dejanos tu comentario